APERDYNE LE FILM - SAISON 1

LE COMPLEXE DE L'ORACLE

Épisode 27 : Âme, où es-tu ?

ÂME, OÙ ES-TU ?

Cette idée de la transcendance est frustrante, car la vérité ultime nous devient alors inaccessible. Ce qui ne nous arrange pas, on préfère de loin un monde que l’on peut définir complètement. Cependant, avec une vision transcendantale, même si la somme n’est pas reconnaissable, est quand même plus cohérente pour nos esprits, que des choses venant du néant et se faisant seules, ce qui là n’a pas de sens. D’ailleurs, il suffit d’essayer d’imaginer ce que pourrait être le néant, pour se rendre compte que nous ne pouvons faire autrement, que d’imaginer quelque chose. Alors, puisque la conscience ne peut concevoir son essence d’aucune contingence, pourquoi vouloir définir l’origine du monde d’une singularité, comme cause première ? C’est parce que l’invisible nous dépasse très largement et que vouloir maitriser la vérité qui fait le monde n’est pas de l’ordre de ce qui est possible pour nous. Et ça ne le sera jamais, puisque nous sommes le résultat d’une simplification. D’ailleurs, lorsqu’on cherche à expliquer les liens qui existent entre le monde des particules et celui de la matière, on échoue immanquablement. Et c’est toute la difficulté de la création d’une théorie d’unification, une théorie du tout, que l’on n’arrive pas à créer. C’est parce qu’entre le monde macroscopique et microscopique, il y a des éléments qui appartiennent à une échelle d’ordre supérieur, comme ce qui fait la gravitation ou le temps. C’est la partie invisible, celle de l’au-delà, qui nous empêche de maitriser la vérité qui fait le monde. Il n’est donc pas possible de préciser les effets de la décohérence, à cause du flou dû à des choses, ne faisant pas partie directement des éléments que l’on cherche à unir. C’est le problème de la flamme qui voudrait se théoriser, en s’unifiant au briquet, sans tenir compte de l’intention (la main de Dieu) qui a conçu le briquet et qui permet la flamme. 


Pour la conscience, il en est de même, il faut la considérer comme quelque chose de plus fondamental, puis en chercher les principes de base, qui la relie aux mécanismes physiologiques du cerveau. Et cela fait penser immédiatement au panpsychisme : philosophie selon laquelle, la conscience est un aspect primordial qui se déploierait dans toute l’étendue de l’univers. Avec ça, l’Homme a pris conscience, depuis longtemps, que la réalité a un état profond, que ce n’est donc pas juste un jeu de particules qui s’organise, dont on est incapable de définir l’ascendance. Mais malgré l’épithète, qui se veut toujours nous projeter dans une forme de vérité ainsi établie, l’état profond des choses, pour l’Homme, s’organise quand même toujours au plus près. Toujours comme une doctrine de cause finale. Et comme pour la matière, on n’imagine pas les choses autrement que sous forme d’organisation téléologique, une finalité centrée sur l’Homme, quelle qu’en soit l’essence.

 

Néanmoins, cette notion d’état profond fait des émules et d’autres approches évoquent ce genre d’idées. L’animisme notamment, issu des mythes et des premières religions, prétend que les êtres naturels possèdent une forme d’intelligence et d’intentionnalité comparables à l’esprit humain. Les plantes, les animaux, les étoiles, etc. auraient donc une âme. Et là, la notion d’état profond, corrèle le fait même de la vie, que l’on ne s’explique pas, a une intention. Ce qui est intéressant, mais l’aspect téléologique nous cantonne toujours à la cause finale, celle qui ne trouve pas sa raison. Car le fait de dire que tout est à l’image de l’esprit humain, ne décrypte pas l’état profond, qui peut très bien changer de système de réalité. En tout cas, l’âme n’est pas une notion insignifiante, tant s’en faut, parce qu’elle pourrait être toute la justification de cet état profond, par ce qui laisse des traces de son continuum et de sa présence. Elle ne serait alors pas juste une capacité à se mouvoir de façon autonome, comme on définissait la notion de vie dans l’antiquité. Ni même cette chose qui théorise les êtres de la nature, comme plus ou moins vivants, sans nécessairement avoir des sensations, comme le fait l’hylozoïsme. 


L’idée de l’état profond et de l’âme, même s’ils persistent, ne font alors pas l’image du monde tel qu’on en a besoin et que l’on cherche. Où Dieu ne semble pas se révéler dans ces idées-là. Ce qui fait que le panthéisme, lui, identifie l’ensemble de la nature à Dieu, tout simplement. La nature y est ainsi interprétée comme une totalité organisée, dont l’unité ne peut être comprise qu’à travers la notion de Dieu. Les choses sont alors plus simples et certains même, considérés comme panpsychistes, estiment que Dieu signifie l’univers en son entier, vivant et avec une âme. C’est cette position et idéologie qu’avait Einstein quand il parlait de Dieu, adhérant de fait à une forme de panthéisme également. Mais le panthéisme ne se prononce pas lui-même sur la nature mentale ou non des entités individuelles, à la différence du panpsychisme. Enfin, le panenthéisme, lui, considère que Dieu pénètre ou réside dans chaque chose, il est omniprésent et en constitue l’essence, participant de la nature de Dieu lui-même. C’est ce que nous explique Jésus de façon implicite et c’est celle qui nous intéresse. Car là, l’état profond et l’âme prennent un sens qui permet une intention. Où Dieu, est ce qui est extérieur au monde par sa nature, tout en faisant partie du monde par sa transcendance.


Mais toutes ces idées, qui, si elles mériteraient d’être évoquées plus en détail, ne nous révèlent en rien la causalité de ces approches. Et à l’image du temps et de l’espace, il est difficile d’expliquer l’existence de la conscience, si ce sont des objets fondamentaux de l’univers. Car là, l’explication scientifique s’arrête. Il faudra donc faire preuve de plus de clairvoyance pour avancer dans la compréhension du monde. Avec le briquet, l’idée amusante que Dieu soit fumeur nous donne à comprendre que les choses ont un sens, la flamme a sa raison d’être et une utilité pour Dieu. Mais pour notre réalité, il en va de même. Un ordre transcendant nous donne à comprendre qu’elle a un sens également. Une origine et une raison d’être, qui ne sont peut-être pas dues à un dieu personnel (idée qui dérange), mais ont une nécessité et une intention d’un autre ordre qui a ses raisons. L’origine de l’univers est due à une cause et une intention supérieure qui a une finalité, une raison d’être. La vie et la conscience deviennent alors une nécessité profonde, certes insondable, mais bien réelle.


D’aucuns diront que cela ne règle pas la question de Dieu. Cela ne nous dit pas qui a créé Dieu. Bien sûr, mais si la nécessité profonde de la vie et de la conscience est une nécessité pour Dieu ; si notre réalité et la vie consciente sont le constructeur utile de quelque chose, au dessein de Dieu ; on peut y voir, alors, que cette chose pourrait être l’âme, un peu comme les fruits d’un arbre peuvent l’être pour l’Homme. L’arbre contient en lui-même tous les codes qu’il faut, pour que naisse un jour le fruit, déjà même au sein de la graine. Le fruit issu d’un processus complexe, qui permet à l’Homme de se nourrir, mais de produire d’autres fruits semblables. À l’image de la graine, le principe atomique peut très bien contenir en lui-même le code qu’il faut, pour qu’émerge non pas que la matière, mais ce qui permet la vie également. Les Hommes, en se reproduisant, font germer d’autres âmes avant de mourir, pour permettre l’évolution de ce système.


Mais pour qu’il y ait une âme, il faut un univers, et si l’âme existe, elle est alors une des causes de notre réalité. Si l’on peut trouver une raison à Dieu et une nécessité à tout ce qui existe, elle pourrait être celle-là. Quant à l’utilité que Dieu peut avoir de nos âmes, cela nous échappe immanquablement. Mais si elle nous échappe de notre vivant, peut-être trouve-t-elle son fondement après notre mort. Si l’âme existe, elle peut être alors la graine qui formalise les choses dans un état supérieur. Elle peut être l’objet utile dans le monde de Dieu. Elle peut s’exacerber et prendre un état transitoire, se formalisant et prenant parti d’une réalité dans laquelle les choses nous paraissent ainsi comme une évidence, mais inatteignable dans notre réalité.


On peut bien sûr tout imaginer, mais si vous pensez que l’âme existe, alors elle ne l’est certainement pas sans raison. Car tout ce qui existe a une raison d’être. Et si vous pensez que quelque chose est à l’origine de notre réalité, ce quelque chose, quel qu’il soit, ne l’a probablement pas fait sans raison également. La raison s’opposant au néant, si quelque chose existe plutôt que rien, c’est que la raison s’étale bien au-delà de notre perception. On peut en déduire que si notre réalité est faite pour qu’émerge la vie, la raison qui en est à l’origine, a alors un rapport possible avec elle. Et que par conséquent une vie utile doit être en relation avec ce qui en est à l’origine. Comme notre réalité nous montre, par bien des aspects, que la vie n’est pas indépendante du reste, par principe, la vie est donc à même de communiquer par ce qui en est à l’origine. Bien sûr, l’idée que l’univers et la vie ne soient qu’un incubateur d’âmes peut être désarmante. Mais pourquoi pas après tout ? On peut alors mesurer la chance que l’on a d’en être témoin et de participer à cela. Et rien ne laisse penser que l’Homme soit le seul concerné. Toute forme de vie dans l’univers, ayant la conscience d’un état supérieur, peut-être une âme utile à Dieu. Il faut pour ça que l’âme puisse subsister et être reliée de notre réalité à l’autre. Mais cette possibilité est parfaitement réaliste, si l’on ne voit pas l’âme comme un objet. Si elle est déjà reliée à l’autre réalité, elle peut très bien jouer son rôle, par la conscience que permet la vie, et trouver son utilité finale au moment de notre mort. 


Dans le monde des particules, de nombreux paradoxes existent. On ne se les explique pas, parce que notre refus de Dieu, nous empêche de considérer les choses, autrement que, comme un tout, qui nous est palpable et mesurable. Mais des choses palpables sont aussi d’ordre transitionnel. Des choses qui ne sont pas mesurables, car juste l’effet d’autre chose. Il est donc acceptable que les processus qui engendrent notre univers soient également capables de créer des transitions d’un niveau à l’autre de complexité. L’âme peut ainsi parfaitement être un lien informationnel, qui nous unit à d’autres échelles de réalité. Par exemple, en considérant que le passé soit conservé, c’est une idée qui suggère que notre univers puisse générer son énergie de façon transitionnelle. Et que tout ce qui est à un instant « T » demeure en partie. Ce qui change, c’est uniquement ce qui doit être changé à chaque instant, au gré des interactions des particules. On pourrait imaginer ça un peu comme un métier à tisser, où le tissu se déroule à mesure, avec le motif qui change au fil de l’avancement. Des points de couleur apparaissent, d’autres s’arrêtent, d’autres demeurent le temps nécessaire. Mais le tissu lui subsiste, garant du continuum nécessaire à la causalité. Alors, si la vie d’un Homme est un motif sur ce tissu, ce qu’il a été, persiste pour Dieu, affilié au tissu. L’âme du vivant devient disponible, participant d’autre chose quand vient sa mort…


La question de l’âme est évidemment intimement liée à la mort. Et c’est parce que l’Homme ne trouve pas de raison logique à sa disparition inéluctable qu’il imagine cette raison qui le maintiendrait en vie pour l’éternité. Cette raison qu’est l’âme donne alors un sens logique à sa vie et à son comportement de vie. Et cette idée très ancienne vient de l’intuition permise par la conscience. Cette conscience qui émane du tout et qui pousse au continuum vital. Car quelque chose de profond nous fait dire, que la vie doit se maintenir à tout prix. Et que des choses inertes, par l’assemblage hasardeux qu’elles permettraient, ne peut naitre une nécessité critique qui échappe au hasard. Il est évident que la vie ne peut apparaitre par hasard, puisque la réalité dans laquelle elle nait, ne l’est pas. La vie n’est possible que parce que l’univers existe et se maintient. C’est donc toute la réalité dans son fonctionnement qui permet la vie passée, présente et future. Notre nature n’est pas le fait d’un jeu de billes qui s’entrechoque et qui fait de jolies choses. Non, toute l’histoire de notre réalité n’a qu’une finalité, celle de la conscience permise par la mécanique de la vie, qui ne peut exister que par ce qui maintient la réalité en place. Et c’est parce que les choses sont conservées dans leurs fondements que l’âme peut exister.


L’âme est alors une part physique de ce qui existe et qui permet, avec nos corps, d’avoir une relation avec ce qui maintient notre réalité en place. Il ne faut donc plus imaginer notre réalité, comme juste une évolution, qui abandonne ce qui a été pour ne construire que ce qui sera. Ce qui a été est bien toujours là, mais nous n’avons conscience que de ce qui évolue. On pourrait imaginer ça, comme une montagne qui monte sans cesse, où nous serions au sommet, sans jamais avoir conscience de la montagne. L’univers, et tout ce qui existe, ne peuvent se maintenir, que par ce qui en fait le principe. Et c’est de ce principe que l’âme a toute sa raison d’être. L’âme est en quelque sorte ce qui nous relie aux origines de notre réalité. La suite possible est alors l’utilité qu’à l’âme d’exister, dans ce qui est à l’origine de la réalité. Il n’y a cependant aucune raison de croire qu’il s’agisse d’une vie telle qu’on l’a connue, les choses sont certainement de toute autre nature. Et s’il est bien sûr impossible de se projeter sur ce qu’elle pourrait être, on peut toujours penser en termes d’évolution de celle-ci, pour pouvoir justifier son existence. On peut alors imaginer l’âme, comme une nécessité pour ce qui est à l’origine de notre monde, et qui déterminera ce que l’on sera une fois notre chemin accompli.

LE COMPLEXE DE L'ORACLE

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